ALERTE : disparition annoncée des Sciences de la Terre au Muséum National d'Histoire
Naturelle (Paris)?
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Information reçue récemment d'un correspondant
à Mulhouse.....
Une réforme en profondeur de l'architecture des activités du Muséum (recherche, collections, muséologie) et de sa structure administrative
a été impulsée depuis plus d'un an par le précédent
ministère de l'Education Nationale, tutelle principale de l’établissement.
Un administrateur provisoire, choisi en dehors du cercle des scientifiques,
a été nommé pour administrer le Muséum dans cette
période de transition et préparer son organisation future. Celle-ci
serait basée essentiellement sur la disparition des laboratoires actuels
et sur la séparation des instituts de recherche et des galeries d'exposition.
Le décret précisant cette organisation est toujours dans les
circuits administratifs. Le soin de déterminer l'avenir des missions
du Muséum, et notamment celui de la recherche qui se fera dans ces nouvelles
structures, a été confié à un comité scientifique
dit " d'orientation ". Après un an de travaux, basés
essentiellement sur l’audition des directeurs de certains des actuels laboratoires
et sans aucune concertation avec les personnels des laboratoires (au moins en
Sciences de la Terre), ce comité a rendu son rapport le 10 Novembre dernier
aux ministères de tutelles (Education nationale, Recherche, Environnement),
au directeur de la Recherche, à l'administrateur provisoire et aux personnels
du Muséum.
La lecture de ce rapport laisse peu de doute quant à la disparition
déjà programmée des Sciences de la Terre en tant que telles,
aujourd’hui représentées par les laboratoires de Géologie,
Minéralogie, une partie de la Paléontologie et de la Préhistoire.
La paléontologie a un avenir conçu dans le cadre d'un grand institut
de systématique "évolutionniste et taxonomique", c'est-à-dire
le vivant. Le devenir de la minéralogie est tout simplement oublié.
Quant à la Géologie, ce rapport mentionne les doutes quant à
la pertinence de son appartenance au Muséum. Sans entrer dans les détails
techniques de ce document riche en contradictions, notons que les instituts
ont comme point commun d'être organisés autour de la biosphère,
sans aucune mention à la Terre et aux environnements passés. L’éventualité
de la création d'un institut des Sciences de la Terre ou du monde minéral,
tendance pourtant logique qu’ont adoptée les grands Musées à
l’étranger et la plupart des grandes structures de recherche universitaires,
en France ou ailleurs dans le monde, n’est pas envisagée.
Nous ne pouvons accepter ce découpage arbitraire de la science qui traduit
une conception pour le moins curieuse des Sciences de la Nature, réduite
à la seule approche systématique du monde vivant, sans aucun regard
ni sur son passé ni sur la terre solide sur laquelle la vie se développe
et évolue. Une telle décision est en contradiction avec la tendance
générale visant à intégrer dans la démarche
scientifique les interactions entre géosphère et biosphère
qui demeurent indissociables pour la compréhension des phénomènes
naturels. Les potentialités futures d’un Institut des Sciences de la
Terre et ses interactions avec les autres disciplines sont nombreuses (interface
minéral-vie, problème du CO2, pollutions d’origine minérale
(métaux lourds, amiantes, etc). Une telle décision priverait aussi
l’établissement de son rôle d’interlocuteur naturel du monde des
amateurs et de son activité d’expertise pour le public.
De plus, cette amputation d’un pan entier de la connaissance naturaliste au
Muséum va à l’encontre de :
1) la qualité scientifique des laboratoires reconnue par le label CNRS
depuis plus de 20 ans et des évaluations récentes très
positives ;
2) l’importance internationale et la qualité de gestion des collections
(qui font partie du patrimoine national) et qui sont indissociables des activités
de recherche de haut niveau;
3) du lien fondamental et naturel entre les trois missions de l’établissement
: recherche, collections et diffusion des connaissances.
Le Muséum National d’Histoire Naturelle, comme son nom l’indique, est
un organisme national. Son devenir ne peut pas et ne doit pas se décider
en fonction des différentes politiques d’aménagement et d’organisation
de la recherche dans la seule région parisienne.
Peut-on imaginer un instant une BIODIVERSITE indépendamment du support
qu’est la GEODIVERSITE et laisser disparaître sans réagir ce patrimoine
historique, les activités de recherche reconnues par les tutelles et
la mission de service public de l‘établissement? Notre réponse
est catégorique : non. Mais si cela devait par malheur arriver un jour,
le MNHN ne pourrait plus prétendre à son appellation actuelle
de Muséum National d'Histoire Naturelle; Muséum des Sciences de
la Vie serait amplement suffisant.
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